Il est rare que je partage un article , mais celui-ci est très intéressant pour expliquer et comprendre les corps subtils . Il est paru dans « ESPRIT YOGA » du 27/02/2020 .
« Qu’est-ce que le corps subtil ? Selon la sagesse indienne, il s’agit d’une couche d’énergie qui recouvre le Soi. La compréhension profonde de la vie propose des réponses pour appréhender cette notion de corps subtil qui nous vient d’Orient. L’accès à la dimension invisible et subtil rebattrait les cartes de notre existence, en nous conduisant vers plus de bonheur et de santé.
Le corps subtil d’Adi Shankara (788-820) à Deepak Chopra
Adi Shankara a été l’un des enseignants les plus influents de la philosophie du yoga et des Veda. Par son analyse des couches de vie qui masquent l’essence, le Soi, il renouvela la science védique. Il nous lègue : « Le Soi est recouvert par les cinq gaines, elles-mêmes causées par le pouvoir d’ignorance… Connais le Soi, qui est distinct du corps et de toute forme, comme une tige d’herbe dans ses fourreaux foliacés… L’aspirant avisé doit s’appliquer à la discrimination (viveka) entre le Soi et le non-Soi. »
Pourquoi chercher à analyser cet amas d’énergie qui constitue l’individu ? A la racine de la distinction des couches d’énergie, il y a un dessein : dépasser l’illusion des agrégats du non-Soi, pour embrasser le Soi, seule Réalité absolue. Un moyen, selon Adi Shankara, de dépasser la souffrance enracinée dans le monde des phénomènes impermanents.
Le Dr Deepak Chopra se réfère aux enseignements d’Adi Shankar. Selon lui, le sage distinguait ainsi trois corps : le corps physique, le corps subtil et le corps causal. Le corps subtil est lui-même composé d’enveloppes secondaires :
.Manomaya Kosha : le corps mental qui stocke nos impressions sensorielles. Les expériences des sens sont gravées dans cette couche d’énergie. Le mental peut traverser différents niveaux de conscience et les usages des sens évoluent en conséquences.
.Buddhimaya Kosha : l’intellect, la dimension de l’esprit qui choisit. Cette enveloppe rassemble les informations fondées sur les croyances et les sentiments pour en déduire une décision. Dans le yoga, la fonction ultime de cette couche énergétique est la capacité à distinguer le réel et l’irréel.
.Ahankara : « ce qui forme le Je », l’ego, c’est ce que l’on veut projeter vers soi et vers le monde. Il est constitué de nos identifications à notre rôle, notre position sociale, nos biens matériels, notre identité dans la société.
Se retrouver dans les nuances du corps subtil exposé par la philosophie indienne n’est pas toujours simple.
Or, les enseignements du yoga ont conduit à une évolution de ce classement qui inclut maintenant dans le corps subtil, le Pranayama Kosha, qui est le corps de l’énergie vitale, du souffle de vie. Une enveloppe originellement classée dans le corps physique par Adi Shankara, l’énergie vitale étant intimement reliée aux organes vitaux. Enfin, Buddhimaya Kosha et Ahankara ont été regroupés sous une appellation commune, Vijnanamaya kosha, le ressenti de l’individualité.
Aujourd’hui investigué par les sciences quantiques, ce champ d’énergie conduit à de nombreuses théories modernes telles que le pouvoir de l’intention. Le Dr Nathalie Geetha Babouraj, médecin spécialisée dans la prévention et créatrice de l’Institut de Santé Intégrative nous éclaire sur ces enveloppes énergétiques explique-t-elle :
« A mes publics médecins ou scientifique, je dis que les corps subtils, ou énergétiques, sont en fait ce que nous sommes capables de ressentir. A l’intérieur de nous. Comme à l’extérieur de nous. Grâce à notre système nerveux sensitif, sensoriel et autonome. Nous connaissons bien le corps physique en médecine, et nous pouvons le conceptualiser à travers le système nerveux moteur, celui de l’action. Nous concevons aussi la psyché, avec notre corps mental, et le système nerveux analytique ». Le Docteur Babouraj nous explique que notre corps physique est pourvu des outils nécessaires au ressenti du corps subtil. Un postulat qui bouleverse le champ d’application de la médecine. Car elle va plus loin : « nous ne sommes pas qu’un corps avec une tête. Nous sommes beaucoup plus variés que cela. Et la physique quantique va dans ce sens. A l’échelle de l’infiniment petit, comme de l’infiniment grand, nous serions information et énergies qui circulent. ».
Marie-France Bel, auteure de l’ouvrage « Corps subtils – science et médecine », adopte un point de vue qui corrobore les propos du Dr Boubaraj. Selon elle, la physique, en découvrant le concept de vide quantique, décloisonne le champ de la science. Et si aucune conclusion scientifique n’a été pour l’heure pleinement plébiscitée en faveur d’une conscience universelle, animant l’énergie et la matière de l’infiniment grand à l’infiniment petit, la croisée des chemins entre science objective et sagesse ancestrale semble de plus en plus proche.
Cette ouverture trouve tout son sens au sein de la médecine qui, malgré un cadre législatif ferme, s’octroie quelques accointances avec les thérapies énergétiques. Des coupeurs de feu convoqués dans les hôpitaux pour soulager les grands brulés, des maitres reiki qui viennent à bout de douleurs chroniques, des rituels chamaniques pour aider des individus atteints de pathologie psychiatriques, sans parler de l’acupuncture et du yoga thérapeutique, prescris par le corps médical comme remèdes à divers maux. Que les sceptiques ouvrent grand leurs yeux, un vent de coopération entre médecine moderne et guérison par l’énergie commence à souffler. Et pour cause, la maladie physique serait le symptôme final d’un déséquilibre énergétique.
Toutes les maladies prennent racine dans le corps subtil
Au regard de l’Ayurveda, la maladie prend racine dans le monde subtil, par une imprégnation du corps causal, ou un déséquilibre du corps subtil. Une approche que la médecine moderne reconnaît à travers la notion de somatisation.
Le Dr Babouraj le confirme : « Dans les sagesses anciennes, tout être humain est supposé être en bonne santé. La maladie, si elle apparait, serait là pour lui indiquer un déséquilibre. En Ayurveda, le corps le plus essentiel, c’est l’âme. Quand nous nous éloignons de notre chemin d’âme, nous allons créer un déséquilibre. Qui va se ressentir par un coup de mou, une sensation de déconnexion globale. Puis ce déséquilibre va se propager dans le corps que j’appelle « expérimental » ou des ressources (vijnamayakosha). La personne va se sentir de plus en plus à l’étroit avec une perte de sens, des difficultés à rebondir sur les résistances de la vie, voire du stress chronique… Puis cela se manifeste dans le corps mental avec des ruminations automatiques, des pensées négatives en boucles ». C’est à ce moment qu’intervient le corps énergétique car c’est dans cet espace que se trouvent les fameux troubles psychosomatiques énergétiques en médecine.
« On ne sait pas trop ce que la personne a, poursuit le Dr Babouraj, tous les examens sont normaux. Pourtant le tableau clinique n’est pas à la forme. Et quelques mois après apparaissent des symptômes qui cette fois seront mesurables, quantifiables, et là seulement on lancera une prise en charge avec bilans et propositions de traitement. Mais on aura perdu plusieurs semaines voire mois ou années, en fonction de degré d’adaptation à la survie de la personne. Aujourd’hui, je pense que toute maladie a une origine psychosomatique. Oui, même une entorse de cheville, à priori purement physique. »
Les actes manqués relèveraient de ces rendez-vous ratés entre l’essence de l’être et sa forme. Qui n’a jamais vécu cette chute qui empêche l’aboutissement d’un voyage indésirable ? Et cette maladie qui survient alors que la pression professionnelle augmente et qu’une partie de nous a juste envie de tout laisser tomber ? Toutes ces manifestations dans le corps physique, viennent d’une dissonance entre les différents niveaux d’existence.
Fabien, aujourd’hui guide de randonnée et pratiquant assidu de yoga témoigne : « je ne m’écoutais pas vraiment, enfin pas les bons messages. Je m’obstinais à suivre une voie professionnelle qui m’amenait un grand confort financier, mais je me sentais de plus en plus fatigué, déprimé, avec la sensation de nager à contre-courant. Puis j’ai eu des petits rhumes, puis des angines, des infections des bronches, et tout ça prenait de plus en plus de temps à être soigné. Enfin, j’avais des tremblements en voiture avant d’aller travailler, des palpitations et mon médecin m’a arrêté soupçonnant un début de burn-out. J’ai vite réagi, guidé par ma prof de méditation. Et je me suis formé et j’ai changé de voie professionnelle afin d’accomplir un rêve de gosse même si ça allait déplaire à mon entourage. Depuis, tout semble être rentré dans l’ordre, j’ai retrouvé ma vitalité. Cette réalité du déséquilibre énergétique aura été très tangible pour moi. »
Vers la compréhension spirituelle de l’existence : un chemin intimement lié au corps subtil
L’intégration de la notion de corps subtil dans le quotidien conduit inexorablement à poser un regard spirituel sur le monde. Armanda Dos Santos est consultante en Ayurveda et professeure de kundalini yoga : selon elle, « la santé, l’équilibre physique, physiologique et psychique de l’individu est dépendant de l’harmonie entre son enveloppe grossière (le corps physique) et ses enveloppes suprasensibles, non perceptibles, qu’on appellera aussi « corps subtils », corps éthérique, corps astral, corps causal, chakras, centre Hara, kundalinî… et qui sont parcourus par des courants d’énergie, comme les nâdî en yoga, les Marmas en Ayurveda ou les Méridiens en acupuncture. »
Elle explique : « Je dirais ici que notre « développement spirituel » serait peut être la facilité, la maturité, la sagesse, dont on fait preuve pour faire face aux divers aspects de nous-mêmes (les enveloppes subtiles), à les améliorer s’il le faut, à les dompter si besoin… ou à juste les accueillir avec bienveillance et lâcher-prise lorsqu’on n’a toujours pas trouvé les clés pour les surmonter. Ces différents corps, sont interconnectés, et sont autant de couches, comme des peaux d’oignon, interdépendantes les unes des autres. Dans ces couches sont stockées des informations, des mémoires, de cette incarnation et de nos vies passées, de nos lignées maternelles et paternelles. Ce sont par conséquent des corps, des points chargés d’histoire, qui restent encore un profond mystère pour les espèces que nous sommes, et qui sommes-nous, au final, pour comprendre tout ce qu’ils représentent, tout ce qu’ils ont à nous enseigner, comment ils fonctionnent, s’influencent… c’est un grand mystère et une quête infinie ! »
Le chemin intérieur débute quand on émet le souhait de se connaître soi-même et de rencontrer tous les aspects de notre individualité. Appréhender puis maîtriser le corps subtil à travers la maitrise de la parole, de la pensée et du souffle permet de reprendre, progressivement, la responsabilité de qui nous sommes. C’est une démarche qui s’inscrit à l’échelle d’une vie entière.
Emilie, professeur de Hatha Yoga témoigne : « la prise en compte de mon champ d’énergie est devenue une évidence pour moi, dans ma pratique et dans ma vie de tous les jours. Agir, parler, penser avec cette conscience de ma globalité me rend partie-prenante de ma vie. Tout me paraît plus intense et plus vrai. Mes expériences de vie sont vécues depuis un point de vue plus large. Et surtout, j’ai plus d’intuition. » Mais alors, comment faire pour tourner son attention vers l’énergie subtile ?
« Nous, les femmes avons un trésor à revisiter en termes d’écologie intérieure de nos énergies »
« Nous, êtres humains, faisons partie intégrante de la nature. La nature est capable de s’auto-régénérer en permanence, à travers les cycles de la vie. C’est simple. Soit l’humain se coupe de la nature et il sera en sur-vie. Soit il décide de ré-intégrer sa part de nature à l’intérieur de soi et il sera en vie. Et il pourra réaliser son plein potentiel. Je pense que nous les femmes avons un trésor à revisiter en termes d’écologie intérieure de nos énergies. Nos cycles. Loin d’être une tare, ils sont notre véritable boussole intérieure pour préserver nos énergies, et savoir à quels moments être dans l’action et à quels moments être dans la régénération » explique Nathalie Geetha Babouraj.
Ce qui compte est la qualité de présence et la consience avec laquelle on pratique
Il n’y a pas de solution miracle et se référer aux enseignements qui traversent les siècles semble être un choix pertinent. Pour Armanda Dos Santos, « les méthodes, protocoles, dépendent de ce que chacun est capable de pratiquer, de ce qui fait sens à la Nature de chacun : cela peut être à travers une pratique intensive de Yoga, de pranayama, à travers l’alimentation, à travers le chant de mantras… mais aussi à travers la danse, le jardinage, la marche, le silence… A mon sens, ce n’est pas tant la « pratique » ou la méthode choisie, mais la qualité de présence et la conscience avec laquelle on y est pendant la pratique. »
Sarah Leclerc .
Namaste.